Les villes cm b
La Machine rôdait, inlassable. Le vent inclinait les antennes, le soleil jaunissait les feuilles des arbres, mangeait la peinture des volets, le temps ridait les hommes et endormait la Ville, mais la Machine rôdait, éternelle. Elle parcourait, jour après jour, nuit après nuit, les rues larges et sèches, elle interrogeait les rares passants: « Qui êtes-vous ? Votre nom ? Votre adresse ? Que faites-vous ici ? A cette heure?» Elle saluait les habitants. Elle s’introduisait dans les maisons, silencieuse, indécelable, et fouillait. Elle gardait et protégeait la Ville. Elle désinfectait minutieusement et détruisait avec un air de fatalité tout ce qui n’était pas la Ville. Elle errait et cherchait, entre les carrés d’herbe et les marronniers calmes, dans les cours fraîches et dans les petites forteresses tièdes et closes, les espions venus des autres Villes, les étrangers. M. Ferrier était assis sur sa pelouse, ne pensant à rien, ne regardant rien. De sa maison, de toutes les maisons, sortaient des bruits étranges. C’était une musique douce et lente, étirée, écœurante. L’après-midi, M. Ferrier fuyait son poste et ses écrans. Ici, le son ne parvenait qu’amorti par les murs épais, mais il persistait, imprégnait l’air comme une odeur tenace. M. Ferrier vit venir quelqu’un qu’il ne connaissait pas. C’était une chose rare. « Bonne soirée, dit l’inconnu.
—Bonjour », dit M. Ferrier, d’une voix rouillée.
Il y avait longtemps qu’il n’avait rien dit de tel. Il tendit un doigt vers l’homme.
« Vous n’habitez pas ce quartier ? Je ne vous connais pas.
—Je ne suis pas de cette Ville.
—Oh… (Un silence.) Vous êtes un étranger.
—Pas exactement. Ma Ville n’est pas tellement lointaine. Je parle la même langue que vous. Nous habitons le même pays.
—Qu’est-ce qu’un pays, dit sentencieusement M. Ferrier, sinon de l’histoire ancienne ? Il existait autrefois des pays et des empires. Mais nous vivons maintenant au temps des Villes. Il faut se méfier de toute chose. Surtout des autres Villes. Grâce au ciel nous pouvons nous suffire à nous-mêmes. Vous n’êtes pas un espion au moins ?
—Je ne crois pas. Je me promène simplement. Sur les routes. Savez vous que les routes entre les Villes sont en très mauvais état ?
—Cela ne m’étonne pas.
—Et qu’il circulait dessus, autrefois, des milliers et des milliers de gens et de bolides ?
—Autrefois.
—Je voulais faire comme eux. Je voulais connaître d’autres Villes, d’autres endroits. Mais les Villes ne sont pas ce qu’il y a de plus intéressant. Ce sont les heures et les jours de marche entre les Villes les plus passionnants. Avez-vous déjà marché sur de l’herbe ?
Avez-vous vu fuir des fourmis et jaillir des sauterelles de dessous vos semelles ? —Je… Je ne sais pas.
—Toutes les Villes se ressemblent. Elles ont les mêmes petites rues chaudes bordées des mêmes petits arbres secs et rabougris, et sur leurs toits pousse partout la même floraison métallique d’antennes. Elles ont chacune le même dôme. Et chacune, la même Machine chargée de traquer ce qui est étranger. Même les habitants se ressemblent. Avez-vous une Machine, ici ?
—Bien sûr. C’est absolument nécessaire. Nous sommes très fiers de notre Machine. Rien ne peut lui échapper. Vous devriez vous dépêcher de partir. Il est peut-être déjà trop tard.
Note le nombre de la bonne réponse il te donnera une lettre.
Pourquoi la voix de M Ferrier est-elle rouillée ?
1) Parce qu’il est en fer (23)
2) Parce qu’il n’a pas parlé depuis longtemps (28)
3) Parce qu’il est malade (25)